vendredi 21 septembre 2018

8. UNE ÎLE


    J'atteins la grève. J'ai mal partout. À tous mes os. À tous mes muscles. À tous mes tendons. Je m'effondre, épuisé d'avoir nagé si longtemps. J'ai froid et je tousse. Je lève la tête et découvre les alentours. Je me trouve sur une plage de sable blond et fin, recouverte d'une brume épaisse qui ne laisse entrevoir que des troncs de cocotiers. Plus loin, au clapotis des vagues, je devine des falaises plongeant à pic dans l'eau. Je frissonne, faible et perdu. Et revient, taraudante, la question qui a bercé ma vie : " Mais au fait... Qu'est-ce que je fais là ? "
    Des odeurs marines et végétales me parviennent soudain. J'avais oublié qu'on pouvait sentir avec son nez. Mille effluves m'enveloppent. L'air tiède est saturé d'iode, de parfums de fleurs, de pollen, d'herbe et de mousse. De noix de coco aussi, de vanille et de banane. S'y ajoute une note sucrée, de la réglisse peut-être.
    J'ouvre grands les yeux. Je suis sur une île, sur une planète isolée. À l'horizon, je ne distingue aucune autre terre. À part les végétaux, y a-t-il seulement une forme de vie ici ?
    Une fourmi répond à ma question en escaladant mon orteil. Elle est seule. Je la prends sur un doigt et la porte à mon œil. Elle agite ses antennes pour tenter de sentir ce qui lui arrive, mais je sais qu'elle ne discerne qu'une forme géante et rose.
    - Où sommes-nous ?
    Ses antennes se dressent au son de ma voix. Pour elle, je suis une montagne tiède dont le souffle affole ses récepteurs olfactifs.
    Je repose la fourmi sur le sable et elle déguerpit en zigzaguant. Mon maître Edmond Wells était un spécialiste de ces insectes. Il aurait peut-être pu m'enseigner comment communiquer avec eux. Mais je suis seul ici.
    C'est alors qu'un hurlement déchire l'air. Un hurlement humain.
   

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